26 mars 1962: la "bavure" de la rue d'Isly
Suite à une agression contre les forces de l'ordre, le quartier d'Alger, Bab-el-Oued fut soumis pendant plusieurs jours à un blocus et les 75 000 habitants du quartier totalement coupés du reste d'Alger. Tous les jours, de nombreuses personnes ainsi que la Croix-Rouge essaient de passer les barrages afin de porter du ravitaillement aux habitants assiégés par les troupes militaires et des engins blindés. C'était le mois de mars 1962!
Pour la journée du 26 mars, un mot d'ordre est lançé: à 15 heures, formation d'un groupe d'algérois au Plateau des Glières, pour une marche pacifique vers Bab-el-Oued. La Préfecture de Police avertit les manifestants que cette marche est interdite et qu'elle sera, éventuellement, dispersée avec toute la fermeté nécessaire. Mais les Algérois ne tiennent pas compte de cet avertissement et comme prévu des milliers d'hommes et de femmes se réunissent et commencent progressivement leur marche vers Bab-el-Oued.
Dans toutes les rues menant au quartier, des militaires armés sont postés sur les terrasses des immeubles. Des barages canalisent les manifestants pour les forcer à prendre des rues secondaires. C'est ainsi que tout le monde se retrouve rue d'Isly. Un gros barrage bloque l'accès au Bd Bugeaud et des militaires sont postés dans les premières rues latérales de la rue d'Isly. Il y a deux fusils mitrailleurs, l'un braqué vers la rue d'Isly, l'autre dirigé vers la place de la Poste, sans compter les militaires armés de mitraillettes. Brusquement sans aucune sommation, les armes de l'armée entrent en action et les balles pleuvent sur les manifestants.
Des corps tombent aussitôt, fauchés par les balles! Des hommes et des femmes cherchent à fuir mais le piège est infernal. D'autres tentent de se réfugier dans des entrées d'immeubles, des magasins ou encore dans la Poste, tandis que les tirs continuent! Les corps sont de plus en plus nombreux sur le sol: des morts, des blessés... Du côté de la place des Glières, un capitaine s'avance et tente d'arrêter le massacre en hurlant "Halte au feu!" Mais rien n'y fait: une hystérie collective s'empare des militaires et la tuerie continue!
En ces temps tragiques pour l'Algérie, il y avait toujours des ambulances en ciculation dans les rues d'Alger, et les premières secours arrivent sur les lieux, mais rien n'arrête les tirs et plusieurs ambulanciers et pompiers sont touchés par les balles.
Finalement au bout de plusieurs minutes de cet enfer, les tirs cessent! On dénombra 50 morts et près de 200 blessés!
La Préfecture de Police d'Alger avait avertit: répression dans la fermeté! Cela voulait-il dire tirer sur des hommes et des femmes ne représentant aucun danger? Y a t'il eu confusion? Ordres mal interprétés? On ne le saura sans doute jamais. Tout ce que l'on peut dire c'est que la tension nerveuse était à son paroxysme en ce mois de mars 1962: l'Algérie allait devenir indépendante et les militaires français devaient certainement être à bout de nerfs et n'avoir qu'une hâte, retourner dans leur foyer respectif!
